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Après des années d’ignorance face au trouble du déficit de l’attention et hyperactivité (TDAH), on perçoit actuellement, dans certains noyaux bien identifiés, un surdiagnostic de cette pathologie, qui n’aide en rien à la bonne connaissance et prise en charge des enfants présentant un TDAH. Tout d’abord, parce qu’un diagnostic précipité peut conduire à l’ignorance de problèmes capitaux chez l’enfant (émotionnels, sensoriels ou d’autre nature) qui ressemblent beaucoup aux symptômes d’un TDAH mais qui ne le sont pas. Ensuite, parce que ceci suppose que ces problèmes sont traités de manière inadéquate, au moyen de médicaments dont les enfants n’ont pas besoin et en les privant d’interventions (familiales, psychologiques, éducatives ou de stimulation/réhabilitation sensorielle) qui pourraient les aider davantage. Selon les statistiques, en Espagne, il existe entre 4 et 5 % d’enfants hyperactifs, parmi lesquels le pourcentage sous médicaments s’élève à un nombre compris entre 20 et 30 %. Par conséquent, il est utile de continuer à diffuser le besoin d’identification du TDAH, tout comme il est utile de bien l’identifier, sans inclure sous cette dénomination tous les enfants présentant des problèmes de concentration ou des troubles de l’apprentissage.
De fait, il y a encore quelques années seulement, en Espagne, nous nous plaignions du fait que de nombreux enfants présentant un TDAH n’étaient pas diagnostiqués et des conséquences négatives que cela pouvait avoir sur leur évolution. C’est encore le cas en de nombreux points de l’État espagnol, mais, peu à peu, la connaissance du TDAH en tant que trouble du développement cérébral, accompagné d’une immaturité ou d’une maturation lente de certaines régions, s’impose et le TDAH est peu à peu reconnu comme un problème neurobiologique ayant des conséquences socio-environnementales importantes. Mais chaque personne est unique. Malgré toute l’expérience que l’on a acquise dans le domaine du TDAH et même si tous les symptômes d’un enfant semblent très clairement être ceux d’un TDAH, le diagnostic doit respecter un processus comptant certaines étapes indispensables. Il est impossible de diagnostiquer un TDAH sans connaître un minimum la situation émotionnelle et familiale de la personne, tout comme il est impossible de le diagnostiquer sans savoir si la personne est consommatrice de drogues ou si elle voit ou entend bien. La triade de symptômes qui définissent le TDAH (agitation, inattention et hyperactivité) est commune à de nombreuses autres pathologies et situations.
Depuis ces dernières années, bon nombre de propositions de nouvelles solutions diagnostiques ou thérapeutiques pour le TDAH sont énoncées. Chaque hypothèse ou proposition doit être rigoureusement éprouvée ; cependant, seules certaines des propositions des dernières années ont réussi à passer les tests requis pour montrer ou démontrer leur efficacité.
Les problèmes d’audition ou de vue en sont un cas représentatif. Les enfants qui n’entendent ou qui ne voient pas suffisamment bien peuvent manifester certains symptômes similaires à ceux des enfants hyperactifs, tout particulièrement les difficultés de concentration. Comme le New York Times le publiait en titre d’un article, il y a quelques années (septembre 2007), « Ni autistes ni hyperactifs, ils voient parfois double ». Ce titre provocateur répondait à une révision exhaustive dans laquelle étaient communiquées des études rigoureuses, qui avaient démontré que les enfants présentant un « défaut de convergence » connaissaient beaucoup de problèmes de concentration. Par ailleurs, pour donner plus d’espoir, l’article rajoutait que, dans de nombreux cas, un traitement efficace (thérapie visuelle) existait pour le « défaut de convergence ». Tout comme le déficit de convergence est impossible à résoudre à l’aide d’un traitement pour la concentration, un véritable TDAH est impossible à résoudre à l’aide d’exercices visuels (ce que reconnaissent les optométristes eux-mêmes). Mais de quoi s’agit-il ? Le déficit de convergence correspond à une difficulté à diriger ses deux yeux vers l’intérieur jusqu’à converger autant que nécessaire pour avoir une vue bien mise au point et tridimensionnelle des choses. Aux États-Unis, on a signalé que 10 % des enfants présentant un défaut de convergence étaient diagnostiqués comme hyperactifs ou comme présentant un déficit de l’attention en sus et que, au contraire, 16 % des enfants présentant un TDAH avaient également un défaut de convergence.
Ainsi, il semble que sur 20 enfants ayant des difficultés à lire, un présente un problème d’exostose (autre nom du défaut de convergence). Essayez de comprendre lorsque votre enfant vous dit qu’il n’aime pas lire si c’est qu’il n’aime pas ça ou qu’il a du mal à lire.
Il existe beaucoup d’autres problèmes, outre les difficultés à faire converger ses deux yeux comme il se doit, dans le développement de la bonne vision binoculaire, tel que le mauvais contrôle des mouvements des yeux, la mauvaise intégration visuo-motrice, la mauvaise mémoire visuelle et de nombreux autres, traités par les optométristes. Il est nécessaire, pour chaque problème particulier, d’évaluer l’efficacité contrastée des interventions proposées. Pour le moment, la thérapie visuelle (exercices oculaires) pour le traitement du défaut de convergence semble recevoir l’aval de l’un des garants des interventions à test de contraste les plus importants, la Cochrane Library.
Passons maintenant à l’ouïe, une simple hypoacousie légère ou un trouble du traitement auditif (TTA) peuvent également être accompagnés de nombreux troubles de l’apprentissage (notamment des problèmes de concentration et leurs difficultés d’apprentissage secondaires). Pour évaluer les difficultés auditives autres qu’une hypoacousie (surdité) importante, il ne suffit pas qu’un pédiatre généraliste, les parents eux-mêmes ou les professeurs procèdent à une évaluation sommaire et routinière de l’audition de l’enfant. Il est simple pour un enfant présentant une hypoacousie légère de nous entendre sans nous voir, par exemple lorsque nous claquons les doigts ou parlons dans son dos. Une des explications à cela réside dans le fait que des fréquences sonores différentes nécessitent des intensités différentes pour être entendues. Par exemple, les sons sifflants nécessitent plus d’intensité pour être entendus, de telle sorte qu’un enfant peut très bien entendre les consonnes « fortes » sans avoir besoin de voir la personne et pourtant n’entendre aucun des sons « s ». Ainsi, les enfants présentant une hypoacousie légère, même s’ils entendent suffisamment bien les messages auditifs généraux, manquent une bonne partie des informations et ne peuvent pas être très efficaces dans leur apprentissage. La communication auditive est très redondante, ce qui signifie que nous pouvons tous nous faire une idée de ce que l’on nous dit lorsque l’on nous parle, même si le bruit de fond est important ou même lorsque l’on nous parle dans une langue que nous ne maîtrisons pas ; il est vrai que cela nous demande un effort cognitif majeur. C'est pourquoi, pour un bon apprentissage, une bonne capacité auditive est nécessaire et qu’une capacité auditive suffisante n’est pas satisfaisante. De la même manière que pour les problèmes de vue, le traitement des problèmes auditifs est différent de celui du TDAH.
Le trouble du traitement auditif est un terme général qui renvoie à toutes les difficultés auditives « centrales », c’est-à-dire toutes celles qui sont engendrées par des altérations du traitement neurologique des stimuli auditifs. Il s’agit de tous les problèmes dans lesquels l’audition périphérique (au niveau de l’oreille) est correcte, mais dans lesquels l’approvisionnement des informations auditives, son traitement pour extraire les informations nécessaires ou leur évocation (souvenir) fait défaut. Ce type de difficultés se manifeste généralement sous forme de difficulté à bien entendre dans des environnements bruyants, à faire la distinction entre des mots ou des lettres qui se ressemblent, à suivre une séquence d’ordres données verbalement, à identifier l’origine d’un son, etc. Deuxièmement, les enfants présentant ce problème peuvent également présenter des troubles du langage, de l’attention et de la concentration et, généralement, de l’apprentissage. La prise en charge de ces problèmes passe par la manipulation environnementale (modification des stimuli environnementaux, comme la diminution du bruit de fond et le renforcement des stimuli pertinents), des stratégies de facilitation compensatoire et un entraînement phono-audiologique. Comme c’est le cas avec de nombreuses interventions pour des problèmes pour lesquels nous avons une capacité de diagnostic, les traitements pour les TTA ne bénéficient pas toujours de l’aval souhaitable sur la base d’études dans lesquelles leur efficacité par rapport à d’autres traitements ou à aucun traitement peut être contrôlée. On peut citer à titre d’exemple la modulation de fréquences, un traitement indiqué dans de nombreux guides pour le trouble du traitement auditif, mais pour lequel on compte très peu d’informations valables d’études contrôlées qui évaluent son efficacité. L’évaluation des interventions possibles pour les difficultés sensorielles chez les enfants constitue une priorité, étant données les répercussions de ces problèmes sur l’apprentissage et l’extension de l’utilisation de ces traitements.
En résumé, disons que les problèmes auditifs et de vue ne semblent pas être la cause de la majorité des problèmes de concentration, mais bien d’une minorité importante, et qu’ils valent la peine d’être identifiés et traités de manière adéquate. Il est particulièrement important de soupçonner la présence d’un problème sensoriel ou d’autre nature, autre que le TDAH, dans les cas de déficit de l’attention et de concentration sans hyperactivité ou impulsivité. Le diagnostic des problèmes sensoriels (de vue et d’ouïe) est impossible à poser de manière isolée (tout comme le diagnostic du TDAH est impossible à poser de manière isolée), sans qu’il soit nécessaire de prendre en compte le fonctionnement général de l’enfant au niveau des fonctions cognitives supérieures, telles que l’attention ou la mémoire. Par conséquence, une bonne évaluation exige, tout d'abord, une suspicion raisonnable et, ensuite, l’application de tests spécifiques de l’acuité visuelle et auditive (avec des tests de l’acuité visuelle et audiométriques), l’évaluation du traitement des informations visuelles ou auditives et l’application d’autres tests spécifiques, au besoin (tels que les potentiels évoqués).
Les relations exactes entre différents problèmes du développement ou de l’apprentissage, notamment la dyslexie, les troubles de l’attention, les troubles du langage ou les troubles du traitement auditif, ne sont pas exemptes de controverse et, dans bon nombre de cas, il est difficile d’établir de manière catégorique la présence d’une seule de ces difficultés ou d’un trouble du développement plus général nécessitant une intervention directe dans divers domaines. De fait, il existe une superposition importante de ces troubles en ce qui concerne le type de difficultés que l’enfant peut présenter. Non vainement, une grande polémique fait rage sur le fait que les problèmes de traitement auditif devraient être ou non considérés comme un trouble en soi ou comme faisant partie de nombreux autres problèmes d’apprentissage. Quoi qu’il en soit, il est utile d’évaluer le traitement distinct des informations effectué par un enfant lorsqu’elles lui arrivent de manière visuelle ou auditive et, en général, ses points forts et ses points forts faibles en ce qui concerne la manière d’apprendre, puisque certains enfants sont plus efficaces en apprenant à l’aide de supports visuels qu’à l’aide de supports auditifs et vice versa.
En conclusion, une évaluation complète de la vue et de l’audition, intégrée au reste de l’évaluation des problèmes d’apprentissage d’un enfant, peut s’avérer nécessaire chez de nombreux enfants se concentrant mal et chez lesquels on soupçonne un TDAH.
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